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Bruxelles, cité européenne, véritable pot-pourri de civilisations a bien des histoires, petites ou grandes, à raconter au curieux.

Jacques De Cerisy plonge dans le passé chaotique de cette ville, retrouve les visages disparus de ceux qui ont fait son Histoire et rapporte leurs gestes effacés par le temps.

Sous des dehors parfois tristes, la cité cache de l’exotisme et de l’extraordinaire. Presque partout surgissent les souvenirs, souvent indirects, la ville a tellement changé. Mais qu’à cela ne tienne, la mémoire est là. Les lieux ont disparu mais les endroits demeurent, cela suffit pour raconter cet autrefois…

« …c’était au temps où Bruxelles… »



lundi 27 février 2012

Marie de Médicis et Gaston d'Orléans à Bruxelles, 3e partie


Le 12 mai, le duc d’Orléans signa un traité d’alliance avec l’Espagne. Gaston s’engageait à ne faire aucun accommodement avec le roi son frère et à combattre pour le roi d’Espagne contre la France.
Cet engagement solennel n’empêchait par Gaston de continuer les arrangements sur son retour avec le cardinal.

Louis XIII

Ce traité vint naturellement aux oreilles de Richelieu qui en fût fort irrité. Avant toute chose, il fallait engager le duc d’Orléans à rentrer dans le royaume. Sur les conseils de son ministre, le roi activa le procès en nullité du mariage de Gaston et de Marguerite. Comme on pouvait s’y attendre, le parlement déclara la nullité du mariage.

Gaston ne s’attendait pas à une telle rigueur. Il comprit que le cardinal allait lui déclarer une guerre acharnée s’il ne se hâtait pas à consentir une réconciliation.
L’acharnement de sa mère contre Puylaurens allait croissant, et il pouvait craindre à toute heure un nouvel assassinat ; la princesse de Phalsbourg le faisait trembler par ses emportements ; le duc d’Elbeuf était passé dans le parti de sa mère. Tous, de concert, le surveillaient, l’épiaient. Gaston comprenait encore que les Espagnols ne songeaient nullement à remplir les conditions du traité. Et pour cause.
Les hésitations espagnoles, les résolutions inébranlables de Richelieu, la reine-mère et ses partisans, tout cela fit réfléchir Gaston d’Orléans. Il devait absolument rentrer dans les bonnes grâces du roi son frère. L’ambassadeur de Louis XIII qui se trouvait encore à Bruxelles, s’aperçut de ce revirement. Il vint proposer au prince un accommodement qui l’accepta. L’ambassadeur partit immédiatement pour Paris. Devant les circonstances, Gaston se résignait aux volontés du roi, renonçaient à tous les traités qu’il avait signé, mais demanda toutefois l’agrément de sa majesté pour son mariage avec Marguerite. Le roi reçut avec plaisir les ouvertures de son frère, redevenu sage. Louis lui accorda son pardon, rétablit Gaston dans tous ses biens. Delbène, l’ambassadeur français, revint à Bruxelles, avec la lettre du roi. Il retrouva le duc d’Orléans toujours dans les mêmes dispositions. Gaston s’ennuyait beaucoup, désespérant ne jamais revoir la France, de ne jamais vaincre Richelieu avec l’aide des Espagnols. Il croyait même être l’objet de la haine des Bruxellois, il n’osait plus sortir que la nuit.

Le cardinal de Richelieu

Malgré le grand soin qu’il mît à cacher ses négociations avec Richelieu, une rumeur d’un rapprochement entre les deux frères se mit à circuler à Bruxelles. Elle vint aux oreilles du marquis d’Aytona. Gaston s’était rendu à Dinant pour attendre la copie du traité de réconciliation qu’il avait signé. il eut la surprise d’y trouver d’Aytona. Inquiet, il commença par se plaindre au marquis espagnol des mauvaises langues qui cherchaient à le brouiller avec l’Espagne. Il s’aperçut bientôt que l’Espagnol en savait autant que lui sur ce traité. Narquois, le marquis offrit à Gaston de le conduire jusqu’à la frontière avec tous les honneurs dus à un si grand prince, si celui-ci voulait bien l’avertir du jour de son départ. Il ajouta que sa majesté catholique le roi d’Espagne, loin de s’opposer à ce départ, serait la première à l’y engager. Embarrassé, le prince français ne sachant que répondre, chercha à nier le traité, sans y parvenir. S’apercevant de son embarras, le comte de Sallazar demanda à d’Aytona pourquoi son altesse Gaston d’Orléans ne lui tenait pas de grand discours comme à l’ordinaire – Sa Alteza quiere scapar (Son altesse veut prendre la fuite) - répondit d’un ton méprisant le marquis. Revenu à Bruxelles, Gaston y trouva le traité et son départ fut fixé au dimanche d’après. Du mercredi au samedi, il feignit d’éprouver de violentes douleurs de goutte et ne quitta pas le lit. Le samedi, il se promena toute la journée et fit ses visites accoutumées. Enfin le dimanche (8 octobre), à huit heures du matin, il monta à cheval, sous prétexte d’aller chasser le renard. Suivi de dix ou quinze des siens, il sortit par la porte de Halle. Avant de quitter Bruxelles, indécrottable, Il mentit encore aux bourgeois qui gardaient la porte. Il leur recommanda de lui faire tenir une messe prête aux Cordeliers, pour l’entendre au retour de sa chasse. Il s’enfuit ainsi sans un mot d’adieu à sa mère, à son épouse Marguerite de Lorraine et à ses hôtes. Il les abandonnait à leur sort.

Gaston duc d'Orléans

Le marquis d’Aytona regretta que le duc d’Orléans ne lui eût pas annoncé son départ, ce qui l’avait empêché de lui rendre tous les honneurs dus à sa qualité.

Les guerres devenaient de plus en plus impopulaires en France. Marie, restée à Bruxelles, jugea cette disposition d‘esprit favorable à ses intérêts. Elle adressa de nouvelles exhortations à son premier fils en faveur de la paix avec l’Espagne. Elle offrait sa médiation entre lui et son gendre, elle renouvelait par la même occasion, ses instances pour rentrer en France. Mais ce qu’elle ne savait pas, c’est que celui qu’elle avait choisi pour faire parvenir ses lettres au roi, un certain Giulio Mazzarini, nonce du pape, avait déjà choisi le camp de Richelieu qui appréciait ses talents. Aussi le futur cardinal de Mazarin ne mit aucune chaleur à servir la reine-mère. De toute manière Richelieu était bien résolu à ne pas demander la paix et surtout à ne pas la faire par l’entremise de Marie.

Marie, fatiguée d’avoir traîné pendant sept ans sa vie dans l’exil, faisait encore de nouvelles offres d’amitié et de soumission à son ministre. Toujours soucieux de maintenir séparée la famille royale, le cardinal lui faisait répondre que le maintient de la paix du royaume s’opposait à son retour en France. Il désirait, toutefois lui voir choisir sa résidence ailleurs que chez les ennemis de l’Etat, et que si elle s’établissait à Florence, sa patrie, elle y pourrait jouir de tous ses revenus, et y recevoir un traitement conforme à sa dignité.
Marie avait quitté Florence trente-huit plus tôt. Elle regardait comme la dernière des humiliations d’y retourner, au sein d’une famille qu’elle ne connaissait plus. Par ailleurs, elle se figurait toujours que son premier fils n’avait que peu de mois à vivre. Elle voulait être assez proche pour venir en tout hâte réclamer la régence durant la minorité de son petit-fils. Toutefois, elle crut qu’il valait mieux pour elle sortir d’un pays en guerre avec la France quoiqu’elle n’eût qu’à se louer de la générosité de son gendre le roi d’Espagne Philippe IV.


Marie quitta Bruxelles, le 10 août 1638, avec l’intention de prendre les eaux à Spa. Elle changea d’avis en chemin. Elle profita de l’occasion pour accepter l’invitation du prince d’Orange et se rendre en Hollande.

Gaston d’Orléans reconnut l’autorité royale, et Marie de Médicis, après la Hollande, reprit le chemin de l’exil. Il devait la conduire à Cologne où elle mourut après avoir porté en Angleterre le poids de son amère tristesse.

L’appartement qu’habita Marie de Médicis au palais de Bruxelles avait une vue sur le parc et se composait de quatre pièces tapissées de toile d’or et de satin blanc brodé, d’une magnifique chambre à coucher ornée, ainsi qu’un cabinet attenant, de tableaux de grands prix.

La cour brûlée aujourd'hui - Place royale
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